La cocotte minute

temoignage burn out parental

Emmagasiner la pression, je sais faire, depuis longtemps. Quelques petites alertes, une soupape qui tourne un peu, de temps en temps, mais tout reste sous contrôle en apparence, toujours. Sauver les apparences au lieu de traiter le problème de fond, c’est devenu une habitude. Pas le temps, pas le temps, toujours pas le temps.

Je cours à toute heure, je vis au rythme des minutes qui défilent trop vite. Tout est chronométré, planifié, tout doit être fait à l’heure sinon j’ai l’impression de déborder.

Sauf que c’est souvent déjà le cas.

Depuis quand je me mets cette pression pour être dans les temps, tout faire parfaitement, et plus encore ? Honnêtement, je ne me souviens pas avoir un jour fait autrement. Quand j’étais petite sûrement, et encore…
D’où ça vient cette obsession d’être parfaite, de tout contrôler et même l’incontrôlable ? Pourquoi je devrais endosser autant comme si ça m’incombait forcément ? Ce n’est écrit nulle part que je dois gérer sans sourciller maison, administratif, enfants, travail, missions free-lances, y’a pas de contrat pour la charge mentale.

Ces derniers temps beaucoup de choses se sont entremêlées : la vente de l’appartement, la recherche d’une location mais aussi de terrains ou maisons pour la suite, les rendez-vous à la banque, les appels aux agents immobiliers (qui ne me rappellent jamais), la pression (encore elle) quand on te dit qu’il FAUT donner une réponse le lendemain alors que ça ne dépend pas de toi.
IL FAUT. L’injonction qui prédomine dans toutes les phrases et pensées : il faut faire ci, il faut faire ça, penser à ceci, planifier cela… et mon cerveau se mute en cocotte minute qui sifflote de plus en plus, mais que je n’écoute pas.
Rajoutons à ça un travail que j’adore, mais pour lequel j’ai tendance à me mettre bien trop la pression toute seule (ben tiens).
J’ai la chance d’être entourée de bienveillance au travail et dans mon quotidien de free-lance (je pensais avoir le temps de gérer une ou deux missions à côté), mais je ne suis jamais ou presque bienveillante avec moi.

Je trouve un tas d’excuses aux autres mais jamais pour moi. 
Il y a toujours quelque chose de plus urgent à faire que de penser à moi et quand je me fais, je me trouve égoïste.
Un comble !
Je culpabilise de prendre du temps pour moi, comme si je n’y avais pas droit.

Et pourquoi pas moi ? Pourquoi je me sens « en tort » quand j’ose penser à moi alors que 80% de mon temps n’est justement pas vraiment à moi ? Pourquoi on se taxe de « mauvaise mère » quand on ose sortir sans enfant, faillir à ces obligations qui n’ont rien d’obligatoire ?
Je dis souvent qu’on ne m’avait pas prévenue. Que je n’ai pas signé pour ça. Mais je continue. Personne ne m’y oblige à part moi, mais je continue. Et la cocotte siffle un peu plus fort, la température monte et je me noie un peu plus.

burn out pression

On pourrait blâmer qui on veut, la société, l’éducation des petites filles et des petits garçons, nos conjoints, nous… on râle et puis on ne fait rien. Ou plutôt on continue de faire. Est ce que la terre va arrêter de tourner si s’arrête de tout porter ?
Je ne sais pas, je n’ai jamais vraiment essayé. Mais j’aurais tendance à penser que le monde continuerait d’avancer.

J’ai souvent cette impression de râler « pour rien », de me noyer dans un verre d’eau. Et si c’était justement le résultat de mois passés à fermer les yeux sur la cocotte minute qui a muté en bombe à retardement ? Et cette foutue culpabilité qui te dicte d’être la femme parfaite, la mère parfaite, la wonderwoman multitâches qui peut tout faire sans jamais sourciller, elle s’arrête quand ?
Est ce que c’est possible, humainement parlant ?

On sait bien que non, mais on essaie quand même. Et j’ai l’impression que je m’use l’esprit et la santé à essayer, justement.
Mon corps est comme la soupape de la cocotte minute, il dit stop régulièrement. Les insomnies, les maux de ventre, les vertiges, les plaques d’eczéma, les douleurs par ci par là… tant de signaux d’alarme tirés comme pour me prévenir que ce n’est pas bon pour moi. Les cris sur mes enfants, les pleurs quand elles sont enfin couchées, et sans cesse cette sensation d’avoir échoué…
Mais échoué en quoi ?
Quand est ce que le but ultime dans la vie est de tout accomplir sans s’accomplir vraiment ? Sans prendre le temps ?
Parce que le temps, je cours après, mais je ne le rattrape jamais.

Cette fois, j’entends les sifflements avant que la cocotte ne déborde. Peut-être qu’avec le temps, on apprend à s’écouter, à lever le pied, à se pardonner. Peut-être qu’avec le temps, on apprend à laisser tomber ce qui n’est pas important.
Le burn out guette, mais il ne vaincra pas. Et quand bien même il me submergerait, ça me forcerait peut-être à n’écouter que moi…

Cet article a été écrit il y a quelques semaines, avant de remonter la pente et de prendre du recul sur la situation. Je tenais à le publier parce que je sais qu’il peut parler à d’autres, et parce qu’au fond, j’ai besoin d’un rappel, de me confier ici… 
J’ai beaucoup échangé récemment avec certains d’entre vous par mail, en commentaires, sur les réseaux. Je vous remercie pour votre bienveillance et espère vous aider autant que vos gentils messages l’ont fait 😉

4 commentaires

  1. Bonjour,
    En effet c’est article me parle! Mais j’ai enfin compris pourquoi je suis exigeante à ce point avec les autres et surtout avec moi. Pourquoi j’ai toujours une petite voix en moi qui me dit t’as pas fait ci, tu fais pas bien ça, qu’est ce qu’on va dire sur toi…
    ça s’explique par l’education, la programmation. Pour ma part j’ai découvert à 32 ans que ma mère est une personne toxique et que tout ce que je faisais n’etait Jamais assez bien. Que si je faisais blanc il fallait faire noir et inversement.
    Une lecture à conseiller pour ouvrir les yeux:
    https://www.lesmotspositifs.com/blogue/survivre-aux-parents-toxiques/

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